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Et moi quand je lis ça, j'ai encore plus envie d'être instit', j'ai envie de courir à l'école et de commencer une journée, de laisser ouvert le carreau, de jouer à pioche-pioche-qu'est-ce-qu
Mais quand même quand je lis ça, j'ai envie de courir à l'école. Et d'essayer encore un tout petit peu.
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« Sauf si on touche à mon frère, alors là attention parce que je suis capable de tout ce qu'on ne peut pas imaginer ».
Et je rigole, parce qu'une fois, une toute petite fois, c'était il y a fort fort longtemps, y en a un, il a fait du mal à mon petit frère (je te raconte ma vie, ça t'embête pas?), y en a un, il a fait du mal à mon petit frère, le premier des trois que j'ai, et là soudain j'étais tigre et avec mes 32 kilos tout mouillés, je te lui ai cassé la margoulette au un qui lui avait fait du mal à mon petit frère, tellement qu'ils ont dû se mettre à trois pour me rattraper et me retenir.
C'était ma seule fois. Je me souviens bien de ce que ça m'avait fait en mon dedans la douleur qu'on lui avait causée.
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« […] mais j'ai calculé comme un éclair dans ma tête que si je cognais le petit, Ryan le caïd demanderait à tous ses potes esclaves de me tabasser pour venger son protégé alors j'ai préféré frapper le caïd direct dans son pif, parce qu'il était responsable de l'origine des insultes et que c'est préférable de régler un problème dans sa racine. »
Dans sa racine...
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« J'ai oublié de vous dire que je suis quelqu'un de très bavarde. Quand je commence à raconter un truc, ça m'emmène à parler d'une distorsion qui débouche sur une autre que je veux pas oublier de dire, alors ça éloigne du départ comme un arbre avec des branches qui se perdent dans les feuilles. »
Là je te dis rien, je me marre.
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« En cours de français, on a parlé du film qu'on avait vu l'autre jour, Les 400 coups. M. Boisseau nous a dit que le mec qui l'avait exécuté s'appelle François Truffaut – enfin plutôt il s'appelait, parce qu'il est mort depuis le XIXe siècle. C'est un film biographique : ça veut dire que c'est pratiquement la vie de François Truffaut qui est racontée en vrai. Il paraît qu'il était dernier de sa classe et ça m'a fait quelque chose d'apprendre ça, je ne pouvais pas m'imaginer qu'un dernier de la classe pouvait faire un film si bien. Malgré que c'est un vieux film d'époque en noir et blanc, on s'intéresse beaucoup à l'histoire d'Antoine Doinel parce que les choses n'ont pas tellement changé : on s'emmerde toujours autant que lui à l'école et c'est pas près de changer à mon avis. Pour le reste, Doinel a des problèmes avec ses parents, surtout sa mère, et ça ne changera jamais de ce côté-là non plus : les meilleurs parents du monde, ça n'existe pas et faut faire avec ceux qu'on a reçus. »
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« Je déteste cet endroit. Moi et mon frère, on restera pas ici, je vous le garantis sur ma peau. »
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« Rachid n'a rien répondu mais d'autres petites balances ont dit « c'est elle » en me montrant du doigt. Bon, il avait juste l'air con, avec ses crottes de nez de viande hachée, mais c'était pas bien méchant et ça lui ferait mal moins longtemps qu'un gros bleu qui en voit de toutes le couleurs sur le tibia. »
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« La juge a parlé à mon père du rapport de l'hôpital, comme quoi il avait des grammes dans le sang et le visage tout méfié, et elle lui a demandé qui c'était, l'origine des coups. »
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« Il devenait rouge et sa pomme d'Adam était dans tous ses états. »
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« Ça sert à rien de penser aux emmerdes avant qu'ils surviennent mais on ne décide pas toujours qu'est-ce qu'on pense, ça circuite dans la tête sans nous demander notre avis. Enfin, je sais pas pour vous mais pour moi, c'est comme ça. Même si je me force à faire venir une autre pensée en toute urgence, y en a des coriaces qui doublent pour revenir devant. Faut juste attendre que ça passe.
Je sais pas pourquoi je vous raconte tout ça. C'est rien. Je vais reprendre du poil de ma bête. »
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« Le sable était froid et ça m'a fait une chair de poule. »
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« Je me souviens qu'à la fin du film, Doinel court jusqu'à la mer et il marche dans l'eau avec ses chaussures. Puis on voit sa tête en gros plan et il nous regarde. On n'arrive pas à savoir s'il est content ou s'il est triste et ça se termine comme ça. Au foyer, je l'ai regardée plein de fois, cette fin. Quand il commence à courir sur le sable, ça me fait chialer à tous les coups, je sais pas pourquoi. »
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Jan
Claudine Desmarteau
éditions Thierry Magnier
Ça, c'est ce que j'avais écrit en mai de l'année passée.
En janvier de cette année, Claudine Desmarteau te lit un bout de Jan et en parle dans Le temps buissonnier, sur Inter.
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