Et Wolf fils de Hersh devint Willy

«  Dans la cour, la terre était encore gorgée d'eau après le gel et la neige de l'hiver. Chaque pas laissait une empreinte sur le sol détrempé. De jeunes brins d'herbe pointaient leurs petites têtes timides, se frayant un passage entre les dernières plaques de neige et les feuilles mortes, vestiges de l'automne. Çà et là, une fleur des champs précoce faisait une tache jaune dans la verdure. Des poules en train de couver leurs œufs caquetaient à tue-tête, infatigablement. Une couveuse plus efficace que ses congénères se pavanait déjà au milieu de ses poussins à demi nus. Elle cherchait des graines dans le crottin frais encore fumant tout en gardant un œil menaçant sur le chat roux qui attendait le moment où elle baisserait la garde pour attraper un de ses poussins. Mais prête à défendre sa progéniture, elle lançait au chat des « cot cot » pleins de hargne, aiguisant par avance son bec et affûtant ses griffes.
Wolf ramassa un caillou et le lança sur le chat. Comme la plupart des garçons, il détestait les chats. Le matou se percha aussitôt sur une clôture où séchaient des pots d'argile et lui jeta un regard qui semblait le narguer : essaye donc de m'attraper ! Wolf cracha dans sa direction. Il se pencha jusqu'à terre, prit un poussin chétif et nu qui n'avait pas encore de plumes, juste un peu de duvet jaune. La mère tremblait, regardait Wolf de ses yeux ronds et inquiets, mais elle ne lui sauta pas dessus.Elle le voyait caresser son petit, l'envelopper de sa main, le réchauffer de son souffle et lui mettre dans le bec des miettes de pain qu'il venait tout juste de mâcher.

- Allez, retourne voir ta mère, petit piaillard, dit Wolf au poussin n le reposant délicatement.

Il passa devant un cerisier tordu et rabougri, cueillit quelques cerises racornies restées suspendues çà et là depuis l'été passé et becquetées par les oiseaux qui recherchaient un peu de nourriture dans la maigre pupe desséchée. Cela l'emplit de joie et d'énergie. Il sentit une telle force parcourir ses doigts courts que l'envie le rit de briser quelque chose. Il se précipita sur un jeune arbrisseau et entreprit de l'arracher. Mais ses racines étaient solidement ancrées dans le sol, il refusa de se laisser déraciner. Wolf souleva une pierre fichée en terre et la lança avec force sur une bande de corneilles qui croassaient autour d'un tas de fumier.

- Eh, maudites bêtes ! Cria-t-il, non pas en yiddish mais en polonais, comme toujours quand un Juif s'adressait à des animaux. Dégagez, sorcières de malheur, fichez le camp ! L'hiver est fini !

Les corneilles s'envolèrent en hurlant. Des moineaux piaillaient, dansaient, jouaient à se pourchasser. Des hirondelles se démenaient sous les toits de chaule, recherchaient leurs nids de l'année précédente. Au sommet d'une meule de foin, une cigogne tournoyait, dessinait des cercles, battait des ailes, hésitant encore à se poser là. Finalement, de ses longues pattes fines, elle agrippa la pointe du pieu qui dépassait du foin et, du hait de son perchoir, telle une vigie, elle examinait le monde alentour. Le soleil brillait, se reflétait dans les moindres débris de verre, sur les brindilles, dans les dernières plaques de neige, dans chaque petit tas de crottin, dans chaque filet d'eau. La cigogne fit claquer ses grandes ailes et, d'une voix étrangement forte, elle poussa un cri. Wolf leva les yeux et lui cria en retour :

- Cigogne, Majesté, ton nid va brûler ! »

C'est en Ukraine, avant la première guerre mondiale.
Ensuite Wolf émigre aux Etats-Unis et devient Willy.

Wolf fils de Hersh devint Willy
traduit du yiddish par Monique Charbonnel-Grinhaus




iCi çA vA

"La cabane ne vaut rien. Tout le bois est pourri par l'eau et la vermine. Elle est remplie de matériel agonisant. De cuves et de bidons percés. De bouts de bois. De planches, de liteaux, de tasseaux. D'arrosoirs aux culs déchirés. De boîtes. De morceaux de moteurs. D'outils rouillés aux formes étranges et au fonctions oubliées. De pioches sans manche. De pelles tordues. De serre-joints. Une masse et toutes sortes de coins. Un clapier usé par l'acide des crottes de lapin. Une baignoire. Les deux mâchoires cyniques de pièges à loup rouillés. Une caisse à outils impossible à ouvrir. Une quantité infinie de clefs, de pinces, de tournevis et de lames de scie qui ornent un panneau en bois fixé au mur comme un tableau de chasse. Il faudra au moins refaire le toit et renforcer les cloisons. Mais toute la partie gauche est en verre et en Plexiglas. Ce devait être la serre d'hiver ou l'endroit privilégié pour faire germer le potager. Elle donne sur la pente et les berges de la rivière dont on ne distingue pas le relief pour l'instant. La perspective est obturée par les buissons. Tout est recouvert d'orties et de ronces. Mais j'entends la musique de l'eau."

Thomas Vinau
Ici ça va
initialement chez Alma éditeur 
ici en collection 10/18


mOrdre la nEige

Il est arrivé à petits pas nus sur le plancher et il a dit
- J'arrive pas à m'endormir, je peux venir ?
Il s'est coulé contre mon flanc et il a dit
- Je peux regarder ? C'est quoi ? C'est rien que de la poésie ? Je peux lire ? Tu veux bien que je lise ?
Et il a tourné les pages.
De l'autre côté du sommeil, la Reine Mère, la mienne, a murmuré
- Tu peux lire à haute voix s'il y a quelque chose qui te plaît, tu sais.
Et puis elle a ajouté
- Ça fait des milliers d'années que je ne me suis pas endormie sur une histoire qu'on me lisait...
Il a dit
- Celui-là est bien
Il s'est raclé la gorge, et il a commencé

« Aujourd'hui, j'ai vu
Un malandrin
Accroché
A la plus haute
Branche
D'un arbre
De vie
Dans la position
Du douzième arcane

Alors, je me suis
Baissée
Pour cueillir
Un bouquet
Et j'ai mangé
Le blanc
Des fleurs de trèfle. »*

Après les fleurs de trèfle, la Reine Mère ne dormait pas, alors il a continué, page 13, page 14, page 15 , il en a sauté quelques unes, à peine, Le déhanchement du balancier, Divine flânerie, Un jardin dans la main, … Il s'est arrêté à Mordre la neige**.
Il a dit
- Je connais ça, mordre la neige. Ah non, c'est mordre la poussière.
Et il s'est endormi.
J'ai continué, j'aime beaucoup le poème juste après.
Je t'en glisse le début.
Ça s'appelle La pluie frappe sa monnaie

« Il arrive que l'on ouvre
Sa petite bourse
De larmes chaudes
Puis qu'on cherche
Une lavette
Pour sécher le comptoir.

Moi j'affronte la chaleur
Tête nue
Et mon chagrin
Exsude par le bras
Que je monte
Inlassablement
Au-dessus
Des yeux mi-clos
De ma caste.

[...] »

Un samedi nuit sur la Terre, avec, au creux du lit, les poèmes* ** d'Anna de Sandre
Mordre la neige




jAn

« Moi ce que je préfère dans la vie, c'est rigoler, pas me battre, mais on n'a pas toujours le choix. Ce que je préfère, c'est courir et jouer pour me défouler parce que ça me fatigue énormément de rester assise toute la journée sur ma chaise d'école qui est dure pour les fesses maigres et je ne peux pas m'empêcher de regarder le ciel surtout quand il est bleu, au lieu d'écouter les paroles du prof que j'arrive pas à retenir parce qu'il y a trop de retard dans ma concentration et ça me décourage. »
.
Et moi quand je lis ça, j'ai encore plus envie d'être instit', j'ai envie de courir à l'école et de commencer une journée, de laisser ouvert le carreau, de jouer à pioche-pioche-qu'est-ce-qu'on-apprend-aujourd'hui, mais c'est si dur parfois, tu sais, si dur, elle te flanque des contorsions de partout la grande vieille Dame, c'est si dur parfois les chemins de traverse, ça te tord les chevilles en un rien de temps, c'est si dur les chemins de traverse alors même qu'ils ne font pas la nique au grand sentier, bah non, puisqu'ils le bordent, le grand sentier, en fait ils sont copains, mais je sais pas, des fois il doit avoir des œillères dans les ornières le grand sentier, ça il ne le voit pas, et puis il a peur des buissons, alors il se laisse pousser des épines là où y a pas besoin, parce que ça pique déjà sacrément ailleurs, hein, t'es d'accord, et quand je lis ça j'ai envie de courir à l'école et de commencer une journée, une journée d'école pour rigoler et pour avoir le choix. Mais des fois, plein de fois, ça marche pas du tout comme ça, on dirait même que ça veut faire le contraire et alors c'est dur, c'est si dur, et moi je suis toute petite.
Mais quand même quand je lis ça, j'ai envie de courir à l'école. Et d'essayer encore un tout petit peu.
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« Sauf si on touche à mon frère, alors là attention parce que je suis capable de tout ce qu'on ne peut pas imaginer ».
Et je rigole, parce qu'une fois, une toute petite fois, c'était il y a fort fort longtemps, y en a un, il a fait du mal à mon petit frère (je te raconte ma vie, ça t'embête pas?), y en a un, il a fait du mal à mon petit frère, le premier des trois que j'ai, et là soudain j'étais tigre et avec mes 32 kilos tout mouillés, je te lui ai cassé la margoulette au un qui lui avait fait du mal à mon petit frère, tellement qu'ils ont dû se mettre à trois pour me rattraper et me retenir.
C'était ma seule fois. Je me souviens bien de ce que ça m'avait fait en mon dedans la douleur qu'on lui avait causée.
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« […] mais j'ai calculé comme un éclair dans ma tête que si je cognais le petit, Ryan le caïd demanderait à tous ses potes esclaves de me tabasser pour venger son protégé alors j'ai préféré frapper le caïd direct dans son pif, parce qu'il était responsable de l'origine des insultes et que c'est préférable de régler un problème dans sa racine. »
Dans sa racine...
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« J'ai oublié de vous dire que je suis quelqu'un de très bavarde. Quand je commence à raconter un truc, ça m'emmène à parler d'une distorsion qui débouche sur une autre que je veux pas oublier de dire, alors ça éloigne du départ comme un arbre avec des branches qui se perdent dans les feuilles. »
Là je te dis rien, je me marre.
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« En cours de français, on a parlé du film qu'on avait vu l'autre jour, Les 400 coups. M. Boisseau nous a dit que le mec qui l'avait exécuté s'appelle François Truffaut – enfin plutôt il s'appelait, parce qu'il est mort depuis le XIXe siècle. C'est un film biographique : ça veut dire que c'est pratiquement la vie de François Truffaut qui est racontée en vrai. Il paraît qu'il était dernier de sa classe et ça m'a fait quelque chose d'apprendre ça, je ne pouvais pas m'imaginer qu'un dernier de la classe pouvait faire un film si bien. Malgré que c'est un vieux film d'époque en noir et blanc, on s'intéresse beaucoup à l'histoire d'Antoine Doinel parce que les choses n'ont pas tellement changé : on s'emmerde toujours autant que lui à l'école et c'est pas près de changer à mon avis. Pour le reste, Doinel a des problèmes avec ses parents, surtout sa mère, et ça ne changera jamais de ce côté-là non plus : les meilleurs parents du monde, ça n'existe pas et faut faire avec ceux qu'on a reçus. »
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« Je déteste cet endroit. Moi et mon frère, on restera pas ici, je vous le garantis sur ma peau. »
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« Rachid n'a rien répondu mais d'autres petites balances ont dit « c'est elle » en me montrant du doigt. Bon, il avait juste l'air con, avec ses crottes de nez de viande hachée, mais c'était pas bien méchant et ça lui ferait mal moins longtemps qu'un gros bleu qui en voit de toutes le couleurs sur le tibia. »
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« La juge a parlé à mon père du rapport de l'hôpital, comme quoi il avait des grammes dans le sang et le visage tout méfié, et elle lui a demandé qui c'était, l'origine des coups. »
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« Il devenait rouge et sa pomme d'Adam était dans tous ses états. »
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« Ça sert à rien de penser aux emmerdes avant qu'ils surviennent mais on ne décide pas toujours qu'est-ce qu'on pense, ça circuite dans la tête sans nous demander notre avis. Enfin, je sais pas pour vous mais pour moi, c'est comme ça. Même si je me force à faire venir une autre pensée en toute urgence, y en a des coriaces qui doublent pour revenir devant. Faut juste attendre que ça passe.
Je sais pas pourquoi je vous raconte tout ça. C'est rien. Je vais reprendre du poil de ma bête. »
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« Le sable était froid et ça m'a fait une chair de poule. »
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« Je me souviens qu'à la fin du film, Doinel court jusqu'à la mer et il marche dans l'eau avec ses chaussures. Puis on voit sa tête en gros plan et il nous regarde. On n'arrive pas à savoir s'il est content ou s'il est triste et ça se termine comme ça. Au foyer, je l'ai regardée plein de fois, cette fin. Quand il commence à courir sur le sable, ça me fait chialer à tous les coups, je sais pas pourquoi. »
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Jan
Claudine Desmarteau
éditions Thierry Magnier


Ça, c'est ce que j'avais écrit en mai de l'année passée.
En janvier de cette année, Claudine Desmarteau te lit un bout de Jan et en parle dans Le temps buissonnier, sur Inter.


Qui tOuche à mon cOrps je le tue

« L'Aube

au-delà de mon corps de ma peau il n'y a rien ou bien l'océan la guerre la maison d'enfance ma mère ils ne sont pas moi ils ne se confondent pas un instant avec moi je me suis découpée selon les pointillés j'ai un tout petit corps qui tient entier dans le miroir il m'appartient.
[…]

Marie G. perçoit tout à cette heure qui n'est ni la nuit, ni le jour. Tout, la pousse des racines de l'arbre étique planté dans la cour, les cliquetis de clés aux ceintures des nonnes, les gardiens auront beau se déchausser, marcher pieds ns dans les couloirs au matin de l'exécution, elle percevra, elle en est sûre, le frottement des chaussettes sur la dalle nue, les souffles épaissis par le mauvais sommeil, le rhum, l'odeur du tabac noir, le froissement de leurs vêtements à chaque pas, et bien avant, depuis le milieu de la nuit, l'emboîtement sourd des pièces de la guillotine, la rotation des vis dans les perforations du bois, des boulons fixés au couteau, le son de la corde à travers la poulie graissée, chaque glissement de galet dans les rainures des montants jumeaux alors qu'on hisse la lame jusqu'au chapiteau, et maintenant elle compte les silences ; pas de vis : de boulons ; de galets ; de clés ; de chaussettes sur le sol froid. Le silence goutte.

[…]
Une avorteuse. Henri D. tremble. Il a bu un demi-litre de vin blanc ? Son palais râpe. Il décolle du bout de l'ongle l'étiquette de la bouteille. Il caresse du pouce la surface bombée de son verre, le bleu de l'aube l'irise comme une flaque d'essence. Une avorteuse. La terreur d'Henri D., c'est de ne rien voir au fond des yeux d'un condamné, ni la victime, ni le crime, il y a ces résistants, ces communistes que je me force à regarder comme des salauds et j'ai envie de vomir de trouille, de honte, je ne vois pas la victime dans les pupilles, la souffrance d'une victime. Je cherche, je ne trouve pas, je suis en nage, j'ai peur, la lame tombe et mon corps rétrécit, alors le spectre de ma mère serre ma gorge, elle m'étrangle, elle ne veut pas d'un fils comme moi. Je suis l'Exécuteur en chef des arrêts criminels, autrement dit bourreau, pour l'amour d'elle, payé à gages comme un domestique. Je tue, mon corps s'étend, lourd, puissant, je tue.
Henri D. suce le sang qui perle sur le dos de sa main. Le jour pointe sous les stores. Henri D. les relève juste assez pour s'aveugler de soleil.

[…] »

Ils s'appellent L'aube, Midi, 16 heures, 22 heures et l'Aube.
Ce sont les chapitres de Qui touche à mon corps je le tue, de Valentine Goby.
5 chapitres et 3 voix. 3 noms.
Lucie L., Marie G. (il y a eu 50 462 Marie nées cette même année 1903, et dans le bourg de Marie G., trois Marie G. du même âge. C'est écrit.) Et Henri D.
Jules-Henri D. en fait.
L'avortée, l'avorteuse et l'exécuteur.
Une femme, une faiseuse d'anges, un faiseur de mort autorisée.

Je te remets un bout de l'Aube, la première, parce que j'aime ça terriblement, et puis j'arrête.
« Elle se faufile, s'égare entre les couleurs, les sonorités de son prénom prennent les teintes des sirops, les goûts de la guimauve, du bleuet, de l'orgeat, de la rose dans lesquels sa mère et elle, assises sur les marches d'un escabeau, plongent leurs doigts après le jeu. Elles recommencent un peu plus tard, la bouche de la mère passe derrière les liqueurs mauves, vert pomme, anis qui colorent chacune à son tour le prénom de l'enfant. [...] »
Tu le vois l'entrepôt toi aussi, n'est-ce pas ? Tu les vois tous ces bocaux.

Quand on me l'a offert, on m'a dit « tu verras, c'est du très très ciselé, une approche intelligente et très fine de l'histoire, la petite et celle celle avec le grand H. ».
Moi je trouve qu'on n'a pas menti, punaise, ce que c'est bon à lire. Rude, mais bon.
Et on ne lâche rien de ces avancées qui pourraient bien reculer un jour, je nous préfère enfants de Simone (Veil) et Robert (Badinter).

Qui touche à mon corps je le tue







d'unE riVe à l'autRe

Le premier de l'année.
C'était hier, le premier album, le premier jour.
C'est l'histOire d'un pont qui n'existe pas encore.
D'un pont sur le point de. Sur le point deux.
Ça dit des choses comme ça :
"Là, cachée sous les chênes, ils avaient construit une cabane de branches et de fougères."
"Ils construisaient des châteaux d'écorces et des villages de mousse."
"Avec les pluies de l'automne, la rivière avait grossi."
"L'hiver venu, la rivière avait gelé."
"Le feu dans le cheminée barbouillait les murs d'ogres et de lutins terriblement remuants." [je crois que c'est ma phrase préférée]
et puis
"C'est vrai ça. Il suffit de se mettre à l'ouvrage, acquiesça son père."
et surtout
"- Pour votre "cousine", on ne dira rien vous savez.
Des cousines comme ça, tout le monde devrait en prendre soin par les temps qui courent."
...
pRendre soin, c'est un beau verbe non ?
Les mots sont de Cécile Roumiguière, ça ne t'étonnera pas.
Les illustrations sont de Natali Fortier, et ça ne t'étonnera pas non plus, tu commences à deviner, je crois, mon amour immense pour son travail. Un jour, je te raconterai. Comment je suis tombée dans ses images, puis dans ses mots, mes yeux qui se perdent sans jamais se lasser, parce que ses traits racontent des choses à l'infini.
Alors, tu vois, une association pareille, quelle aubaine !
Mes amis libraires m'ont murmuré (je ne pense pas trahir de secret) "Qu'est-ce que c'est beau ! C'est magnifique ! Et ça fait du bien, qu'est-ce que ça fait du bien à lire, là, aujourd'hui, dans nos heures actuelles"
Entre deux rives
de Cécile Roumiguière et Natali Fortier
aux éds A pas de loups




FPM

FPM
fEstival pErmanent des mOts
revue de la parOle contempOraine
et j'imagine des auteur.es-poëtes, panier à la main, bottes fourrées aux pieds, à la cueillette des mots qui traînent. 
Tu ne vois pas ça, toi ? Des mots aux accents truculents ou flemmards, des mots fatigués, des mots dégueulasses, des mots usés, des mots nouveaux-nés, ..., et ces incessants hérauts modernes qui les accueillent en leur giron, des paniers comme des filets à papillons, les pieds dans la gadoue souvent ?
Pour l'instant j'y ai rencontré un pécheur d'or*, un ornithorynque à lunettes** et des Gens***.
J'y ai lu aussi de l'italien, que je ne parle pas, que je comprends peu, mais qu'il me plaît tant de lire. Une vraie terre étrangère.
Ça dit :
Ho imparato la pazienza
l'ho percorsa ai fianchi
strettinel tragitto alla bocca

C'est de Alessandro Brusa, c'est extrait de son recueil La Raccolta del Sale, et ça me fait sourire, parce que le lire dans sa langue, c'est exactement ce que ça me fait, une récolte de sel.
*le pécheur d'or, de Marie-Paule Bargès
** l'ornithorynque à lunettes de Frédéric Déchaux
*** les Gens (qui m'ont conduite jusque là) de Christophe Sanchez (merci)
le FePeMos, tu peux le trouver là :
http://www.fepemos.com/




tÊte-de-mUle

Dis voir, je suis tombée en amour.
Avec Tête-de-Mule.
Avec les Bonshommes de Øyvind Torseter d'une manière générale, je crois.
Il y a quelques semaines, je suis tombée dans son Trou, son absurde trou, avec sa couverture en carton kraft épais (tu vois quoi ?) et sa tranche jaune.

Et là, sur l'étagère de la jolie petite librairie Autour des Mots, cette Tête-de-Mule, qui me murmure Hep hep, par ici, moâ, moâ, moâ !

Et toujours ce même bonhomme, entre Moumine et Gaston Lagaffe.
Que je ne reconnais pas de suite. Ce que je reconnais bien, en revanche, c'est le petit tressaillement de mon p'tit cœur à l'appel du livre.
C'est le soir entre mes oreillers que je me suis dit Oh mais toi je te connais. T'es le bonhomme du Trou.
Autre livre, autre époque, ici point de laboratoire high-tech ni de fable urbaine, ici c'est un conte pourquoi pas médiéval et presque picaresque.
Un héros l'air de rien, un cheval (qui a peur des loups), un éléphant et un loup, une princesse du quotidien, un troll-à-ongles et sans-coeur, et des pierres. En gros.
Sur le derrière de la couv', il est écrit :
"Les Garçons, les Filles, Mesdames et Messieurs, Chers Lecteurs : voici l'épique récit, en des temps reculés difficiles, d'une audacieuse entreprise menée avec classe. Une histoire de choix impossible exigeant la plus grande intrépidité. Le parcours d'un jeune homme, devant risquer sa vie afin de (re)trouver ses frères...
Et le bonheur.
A part ça, on y parle aussi de monter à cheval, de dormir dans un sac de couchage, de se promener dans la nature, tout ça."
Je te montre ?
Bref, je suis tombée en amour avec les illustrations et les histoires l'air-de-rien de Øyvind tOrseter. nOrvégien, évidemment.
tÊte-de-muLe
Øyvind Torster
aux éditions la joie de lire